vendredi 25 novembre 2011

HISTOIRE D'ANIMISME


Proto-religion, pratiques mystiques, croyance aux esprits, définir objectivement l'animisme n'est pas forcément chose aisée, ce d'autant qu'il y aurait "plusieurs" animismes et plusieurs manifestations de l'animisme, selon l'endroit où on se trouve sur la planète et selon les peuples observés. Pour autant, l'animisme fascine, fait peur, inquiète à tout le moins, et ne laisse jamais indifférent d'autant que ces croyances font appel à notre instinct de survie autant quà la relation que nous entretenons avec la nature. La plupart des êtres aussi étranges et variés que les elfes, les nains, les gobelins, les lutins, etc. mis en scène dans les contes et les récits fantastiques, ont sans doute des origines animistes.

L'appel de la nature est ressenti par tous les hommes, à divers degrés. On peut compter de nombreux exemples de personnes qui, un beau jour, ont décidé de tout plaquer et de quitter la civilisation afin de se "retrouver" et de faire l'expérience de la vie sauvage, quitte à y laisser la vie.
A un degré moindre, mais tout de même significatif, quelle grande métropole sur la planète ne possède pas son parc, où les citadins aiment venir déambuler et oublier un moment le stess de la vie quotidienne ? 
Quel rapport avec l'animisme, me diriez-vous ? Simple : il y a indiscutablement un lien subtil entre l'homme et la nature et les forces qui s'exercent au sein de cette nature intéresse l'homme, "intéresse" dans le double sens "intéresser et concerner". Bien entendu, les peuples du passé, et certains peuples vivant encore aujourd'hui en relation étroite avec leur environnement, et que les ethnologues appellent "les sociétés traditionnelles", ont trouvé leurs propres explications et interprétations des phénomènes naturels, cycliques ou non, qui affectent leur existence.
Ces mêmes peuples, depuis l'origine de l'homme, se sont également retrouvé face à l'angoisse et aux mystères de la mort, des rêves, et de similitudes interprétées comme étranges entre le caractère d'un défunt et le comportement de tel ou tel animal ou la forme de telle ou telle plante.
Enfin, la consommation de ces plantes à des fins thérapeutiques, forgées par une pratique empirique et une transmission orale sur plusieurs générations, ont pu conférer aux dites plantes des "pouvoirs" ou même des "personnalités" hostiles ou bienveillantes à l'égard des hommes. Même aujourd'hui, au sein de notre société industrialisée et protégée, quiconque a fait l'expérience de la vie en pleine nature ne serait-ce que quelque heures, ne reste pas insensible.

Edward B. Tylor (1832-1917)
Les hommes de science n'ont pas toujours été d'accord sur la description de l'animisme, et pour l'essentiel, il s'agit là d'une affaire anglaise. C'est en effet par Edward B. Tylor (1832-1917), anthropologue et sujet de sa majesté, que "l'histoire" de l'animisme commence, en même temps que celle, supposée, de la religion, puisque l'animisme est décrit comme la première phase de la religion.
Tout part de la croyance au principe séparé de l'âme, différent du corps, à la suite de deux expériences psychophysiologiques : les phénomènes du sommeil, de la maladie, de l'extase et de la mort d'abord et l'espérance personnelle des rêves et des visions, ensuite.
L'âme, ou la force qui anime les êtres humains, peut, selon les croyances traditionnelles, changer d'état, et changer aussi de support. Les êtres vivants seraient considérés comme des sortes de vases communicants, argument utilisé par certains ethnologues pour expliquer le cannibalisme. Manger son adversaire permettrait de "récupérer" la force et le courage de ce dernier.
Par ailleurs, les sociétés traditionnelles ne font pas tant de différences entre les différentes formes de vie. [Encyclopedia Universalis] Selon Tylor, la croyance en la post-existence de l'âme a donné lieu au culte des morts et des ancêtres. L'idée de la transmigration des âmes s'expliquerait également à partir des mêmes phénomènes. Par analogie, les primitifs auraient conclu que les animaux et les plantes, et même les objets apparemment inanimés, disposent également d'un corps et d'une âme. Car il n'y a pas de différence de nature entre l'homme et les êtres animés ou inanimés qui l'entourent. L'être humain est considéré comme faisant partie intégrante du monde qui l'entoure. Ceci implique par conséquent le respect des formes de vie qui, en retour, contribuent à la vie de la communauté, mais ceci implique aussi que toutes les formes dé vie étant égales, chacune d'entre elle possède une "force", un "esprit", une "personnalité".
C'est ainsi que "l'esprit des ancêtres" pourra âtre associé ici à un arbre, là à un animal, ou même parfois à un "totem" réalisé pour que l'âme s'y réfugie et continue à participer à la vie communautaire, souvent par l'entremise d'un chaman, ou d'un sorcier, détenteurs des pouvoirs lui permettant de communiquer avec l'invisible.

Mais la théorie de Tylor établissant l'animisme comme étant à l'origine des religions sera battue en brèche par d'autres chercheurs, trouvant chacun des explications différentes, comme la rencontre avec une force mystérieuse. L'argument principal avancé étant qu'il n'a pas été possible de trouver une religion exclusivement animiste, et que certaines sociétés ont crû à l'existence d'un ou de plusieurs dieux sans passer par l'étape animiste ou sans que cela ait un lien direct ou indirect avec des pratiques animistes parallèles. De plus, l'animiste ne s'est pas révélée aussi universelle que Tylor l'avait d'abord supposé.
D'autre part, il est patent que Tylor a été totalement influencé par son regard occidental distant. D'autant plus que sa théorie ne s'est appuyée sur aucune analyse sociologique. Son analyse ne s'est appuyée que sur approche psychologique des faits religieux qui présupposerait que le "primitif" serait enclin à voir une âme à tout être vivant ou objet inanimé.
Pour autant “L'analyse du phénomène de l'animisme présentée par Tylor garde encore sa valeur. L'éminent anthropologue anglais a établi avec précision, et avec une documentation vaste et solide, qu'un grand nombre de peuples, « primitifs » aussi bien que civilisés, accordent une importance décisive aux expériences impliquant l'activité de l'âme (ou de l'« esprit »), pendant la vie ou après la mort. Toute une série de phénomènes religieux ne peut s'expliquer que par la croyance à l'autonomie et à la pérennité de l'âme : en premier lieu, la croyance que ce principe spirituel est capable d'abandonner le corps, de voyager dans le pays des morts ou de monter au ciel, qu'il peut pénétrer et posséder un autre corps, qu'il se révèle en quelque sorte indépendant du corps et supérieur à lui puisqu'il le précède et lui survit. Divers phénomènes religieux, comme la possession, le culte des morts, le chamanisme, deviennent compréhensibles à la lumière de telles croyances.” [E.Universalis]

Finalement, l'anthropologie anglo-saxonne finira par intégrer la théorie intellectualiste ou« néo-tylorianisme » “à la suite des progrès de la philosophie des sciences et de celle du langage”. L'anthropologue R. Horton, notamment “pose que les conceptions et pratiques traditionnelles, avant tout instrumentales, sont des tentatives rationnelles et universelles d'« explication, de prédiction et de contrôle » de l'environnement et du cours des événements. Les religions traditionnelles sont des « théories », des cadres conceptuels, dans lesquels les dieux et les esprits constituent des hypothèses théoriques concernant des entités « inobservables ”.
Entités inobservables, comme nos amis les elfes, lutin, etc. Sans oublier le plus fameux représentant d'une sorte d'animisme moderne, devenu entité commerciale, et auquel je consacrerai quelques lignes bientôt : j'ai nommé notre bedonnant Père Noël !


 ici, Un blog à lire dans la suite de notre précédent post sur les arbres
 

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